• Sexe, genre, orientation, ... De quoi parle-t-on ?

    On peut aujourd’hui se sentir désemparé.e face aux différents termes que l’on peut utiliser pour se désigner soi, son identité et ses pratiques, on peut parfois avoir l’impression qu’il y a de plus en plus d’étiquettes, que cela complique tout... Nous pensons que les mots sont de bons outils pour parler de soi, de ce qu'on ressent, se comprendre et s'accepter, mais aussi pour décrire le réel tel qu’il est, pour penser et rendre visible la diversité de la société.

     

    Pour s’y retrouver, on vous propose donc de vous expliquer quelques termes.

    Dernière mise à jour de la page : 20-01-2023 (rédaction en cours)

  • ▶️ L'identité en fonction de la biologie : le sexe

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    Hommes et femmes ... et personnes intersexes !

     

    À la naissance, un examen médical plus ou moins rapide permet d'assigner un sexe à chaque être humain. En gros, le corps médical observe les traits anatomiques et biologiques représentatifs d'une différence entre mâle et femelle (les chromosomes, les hormones, les gonades, les organes sexuels internes et les organes sexuels externes), et attribue une étiquette à l’individu.

     

    La société propose deux sexes qu’elle définit par des caractéristiques, en résumé :

    - Mâle = pénis + testicules + chromosomes XY

    - Femelle = vulve + utérus + chromosomes XX

    => Or, pour unepartie des êtres humains cette réponse binaire n'est pas adaptée !

     

    Pour vous en parler, nous nous basons sur une audience de la Délégation aux Droits des Femmes qui a eu lieu en 2017 au Sénat et qui fait les constats suivants (documentation détaillée ici) :

    • Il existe des personnes intersexes, « nées avec une ambiguïté des organes génitaux ».
    • Cela correspond environ à 2 % d’enfants par an en France, ce n’est pas rien ! (Il y a autant de personnes rousses que de personnes intersexes sur Terre.)
    • Pendant la deuxième moitié du XXème siècle de nombreux médecins ont réalisé (parfois sans le consentement des parents) des opérations chirurgicales sur les enfants afin de pouvoir leur assigner un sexe mâle ou femelle. Réalisées sur des nourissons ou à l'adolescence, ces opérations ont entraîné, bien souvent, de longues difficultés postopératoires et des troubles de l’identité. L’ONU à d’ailleurs reconnu ces pratiques médicales comme des mutilations et tortures.

    Le problème, c'est qu'en voulant absolument une réponse binaire à la question du sexe, il est difficile de respecter l'intégrité physique et les différents parcours de chacun et chacune ...

  • ▶️ L'identité en fonction des normes sociales : le genre

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    Il est intéressant de faire une différence entre sexe et genre. Comme nous l’avons vu, l'indicateur "sexe" permet à chaque individu et à la société de différencier mâle et femelle, et le "genre" permet de différencier ce qui est masculin et ce qui est féminin. Cela permet de prendre conscience que notre identité ne se construit pas seulement en fonction de caractéristiques corporelles, mais aussi en fonction de rôles, valeurs, et normes sociales.

     

    1- L'identité de genre

     

    Le genre, ou plutôt l' "identité de genre", ce n'est jamais un choix volontaire. C'est une identification personnelle, un sentiment lié à comment la personne se perçoit : dans la grande majorité des cas, on se sent femme quand on a été assignée "femme" à la naissance, et homme quand on a été assigné "homme" à la naissance. Et puis, parfois, on peut sentir que cette réponse binaire ne nous convient pas.

     

    En effet, la binarité du genre doit être questionnée, pour deux raisons :

    1️⃣ attention aux stéréotypes ! Essayer de définir ce qu'est une femme sans parler de son "sexe biologique", est très difficile, ce qui est féminin ou masculin se transforme et évolue en permanence selon les époques et les contextes. Nous aimons rappeler qu'il y a des milliers de façons d'être une femme, des milliers de façons d'être un homme. Aucune façon n'est meilleure qu'une autre, et cela ne devrait jamais justifier la domination d’un genre sur un autre, ni aucune discriminations ou violences.

    2️⃣ on a le droit de jouer avec les étiquettes, et même de les refuser ! Chaque être humain peut vouloir être considéré sous un autre angle que celui de la binarité femme/homme, un angle moins figé, plus fluctuant : ce que je suis, comment je me sens, peut évoluer en fonction de la vie. Les sentiments et ressentis peuvent être multiples : certains, certaines personnes ne se sentent jamais ni homme ni femme (agenre, "agender" en anglais), d'autres se perçoivent en même temps homme et femme, ou ne s’identifient pas à un genre fixe, leur genre pouvant fluctuer dans le temps (bigenre, "bi-gender" en anglais / Genderfluid). C'est leur sentiment personnel à un moment de leur vie, et nous l'acceptons.

    Et donc chaque personne a un sexe et un genre ? Oui, si on veut schématiser on peut dire ça : à la naissance, le genre est assimilé au sexe. C'est à dire que si on m'a assigné un sexe féminin en fonction de mes caractéristiques corporelles alors mon genre sera défini comme féminin.

     

    La difficulté, c'est que, en évoluant dans la société, mon sentiment personnel se construit :

    - Les personnes cisgenres se sentent en accord avec le genre qui leur a été assigné à la naissance. Cela concerne la majorité des personnes.

    - Les personnes transgenres ne se sentent pas en accord avec le genre qui leur a été assigné à la naissance. Par exemple, vous avez été assigné femme à la naissance et aujourd’hui vous vous sentez, vous vous percevez comme homme, alors vous êtes un homme transgenre.

    [A noter que l’on n’utilise plus le mot transexuel·le, il est préférable d’utiliser l’adjectif transgenre]

    Ok l'identité de genre c'est mon sentiment personnel, mais alors comment la partager avec les autres et comment comprendre l'identité des gens que je rencontre ?

     

    2- L'expression de genre

     

    Tout le monde a une expression de genre, puisque, consciement ou inconsciement, tout le monde utilise les codes sociaux genrées basés sur des caractéristiques physiques et comportementales, comme sa tenue vestimentaire, sa coiffure, son maquillage, son prénom, sa pilosité apparente, son pronom (il, elle, ielle), ... Ces indices aident les gens qui nous entourent à se faire une idée sur nous, mais attention l’expression de genre peut ou non correspondre avec l’identité de genre de la personne !

     

    Par ailleurs, quand on observe l'expression de genre d'une personne on peut être désarmé.e par des signes qui sont en dehors des stéréotypes, par exemple : un.e individu peut porter une jupe et du maquillage et se sentir homme, et un.e autre individu peut avoir du poil au menton et se sentir femme ! Et oui, pour nous, chacun·e est libre de faire ce qui lui plaît, tant que il.elle respecte la loi, et même si cela peut être déstabilisant !

     

    Alors, le mieux est de demander à la personne comment cette dernière souhaite qu’on la genre. en lui demandant ses pronoms par exemple : "Est-ce que tu préfères que j'accorde plutôt les mots au masculin ou féminin pour parler de toi ?". Quels pronoms préfères-tu que j’utilise ? ». Le mieux est de se présenter d’abord en précisant son propre prénom et ses pronoms d’usage, afin de s’adresser à lui/elle de façon respectueuse. L’essentiel est donc de communiquer, d’écouter et de respecter les choix des personnes, qui peuvent varier dans le temps et selon les contextes.

    Pour mieux comprendre à quoi servent tous ces mots, intéressons nous à la vie de Béatrice Denaes, une journaliste française, née en 1956, connue sous le nom de Bruno Denaes.

     

    A la naissance, on lui assigne un sexe masculin, et donc son genre est assimilé masculin. Vers 5 ans, elle commence à se rendre compte que son corps ne correspond pas à son sentiment intime. Son identité de genre est féminine, mais pendant des années, elle se tait et adopte une expression de genre masculine.

     

    A la retraite, elle décide d'entamer une transition de genre, qui lui permet de transformer son expression de genre afin que celle-ci soit en accord avec son identité de genre, et que dorénavant tout le monde la reconnaisse en tant que femme.

  • ▶️ L'identité en fonction de qui on aime : l'orientation

    Il existe de multiples orientations sexuelles et romantiques. Rappelons d'abord que ces orientations ne sont jamais un choix volontaire, et qu'elles peuvent être fluctuantes tout au long de la vie.

     

    La volonté de nommer, de créer de nouvelles étiquettes, permet aux individus de se définir hors du cadre hétéronormatif imposé par la société, montrer qu’iels existent, qu’iels ne sont pas seul·es, qu’iels sont légitimes. Dans ce cas, pour choisir le bon mot, il faut prendre comme point de départ l'identité de genre de chaque individu.

    Par exemple :

    Je suis un femme attirée par les femmes, alors je suis lesbienne (homosexuelle),

    Je suis un homme attiré par les hommes, alors je suis gay (homosexuel),

    Je suis une femme attirée par les hommes, alors je suis hétérosexuel,

    Je suis un.e individu attiré.e par les femmes et les hommes, alors je suis bisexuel.

    Je suis un.e individu attiré par tous les autres individues, sans distinction de sexe ou de genre, alors je suis pansexuel.

    [A noter qu’on ne distingue pas le fait que les personnes soient transgenres ou non. Si une femme transgenre est attirée par les femmes, alors elle est lesbienne.]

    Pour autant chacun·e est libre de se définir avec ou sans ces étiquettes, dans leur pluralité et contradiction.

     

    Il est intéressant de parler d'orientation sexuelle et/ou romantique pour visibiliser les personnes qui éprouvent une distinction entre relation amoureuse et relation sexuelle.

    - les personnes asexuelles n’éprouvent pas d’attirance sexuelle pour d’autres personnes mais peuvent s’engager dans des relations amoureuses si elles ont une orientation romantique définie.

    - les personnes aromantiques n’éprouvent pas d’attirance romantique pour les personnes mais peuvent éprouver de l’attirance sexuelle si elles ont une orientation sexuelle définie.

     

    Mais en fait, l'orientation sexuelle / romantique est donc une chose très personnelle qui concerne seulement la vie privée voir intime des êtres humains. Connaitre l'orientation d'une personne n'a d'intérêt que si vous souhaitez débuter une relation sexuelle et/ou romantique avec elle 🖤 Et toutes insultes, violences ou discriminations en raison d’une orientation sexuelle, réelle ou supposée, sont interdites et punies par la loi !

  • ▶️ On fait quoi avec tout ça ?

    Nous vivons dans une société hétérocisnormative, c'est à dire dans laquelle il est considéré comme normal d’être hétérosexuel·le, hétéroromantique et cisgenre, parce que cela concerne la majorité des personnes. Cependant, tout comportement ou pensée en dehors de cette norme n'est pas anormale. Il est essentiel de reconnaître la diversitédes identités et expressions de genre, des orientations sexuelles et romantiques, d'éviter toute supposition sur le sexe, le genre et l’orientation sexuelle et romantique des personnes. Aucune personne ne doit être réduite à son identité de genre, ou à son orientation sexuelle et romantique !

     

    → On respecte les choix, l'histoire et les ressentis de chacun.e.

     

    → Si on a un enfant qui présente des questionnements sur les questions de genre, on l'accompagne, on s'informe, et si on en sent le besoin, on consulte des professionnel.les du médico-social spécialisé. Et surtout on ne dramatise pas : se questionner quand on est enfant ne veut pas dire qu'une transition de genre est inévitable. Un enfant qui se questionne est un enfant qui est en train de se construire, et nous sommes toutes et tous passées par là !

  • Pour aller plus loin :

    Si vous souhaitez avoir plus d’infos et de définitions sur les identités de genre et les orientations, nous vous conseillons de suivre la formation gratuite proposée en ligne par l'Université de Montréal (3h) : Trans•diversité (edulib.org).

     

    Bibliographie :

    • Entretien filmé de Christine Delphy avec Sylvie Tissot, le genre précède le sexe : https://lmsi.net/Le-genre-precede-le-sexe
    • Laure Bereni, Sébastien Chauvin, Alexandre Jaunait et Anne Revillard, Introduction aux Gender Studies, Manuel des études sur le genre, 2008
    • Anaïs Bohuon, Le Test de féminité dans les compétitions sportives. Une histoire classée X ?, Paris,éditions iXe, 2012
    • Isabelle Clair, Sociologie du genre, Armand Colin, « 128 », 2023
    • Raewyn Connell, Meoïn Hagege, Arthur Vuattoux et Éric Fassin, Masculinités : enjeux sociaux de l’hégémonie,2014
    • Anne Fausto-Sterling, Corps en tous genres. La dualité des sexes à l’épreuve de la science, 2000, trad. 2012
    • Delphine Gardey, Ilana Löwy (dir.), L'Inventiondu naturel. Les sciences et la fabrication du féminin et du masculin, Paris, Éditions desArchives Contemporaines, 2000
    • Erving Goffman, L’arrangement des sexes, Paris, La Dispute, 2002
    • Françoise Héritier-Augé, Masculin/Féminin. La pensée de la différence, 1996
    • Françoise Héritier-Augé, Masculin/Féminin.II. Dissoudre la hiérarchie, 2002
    • Irène Théry, La Distinction de sexe. Unenouvelle approche de l’égalité,2007
    • Evelyne Peyre et Joëlle Wiels, « De la ‘nature des femmes’ et de son incompatibilité avec l'exercice du pouvoir : le poids des discours
      scientifiques depuis le XVIIIe siècle », Les cahiers du CEDREF, Hors série 2, 1996, http://journals.openedition.org/cedref/1642